L'UNESCO inscrit l'Alpinisme sur la liste du Patrimoine Culturel et Immatériel de l'Humanité

L'alpinisme est une pratique physique traditionnelle caractérisée par une culture partagée, un art fait de savoirs (connaissance de l'environnement de la haute montagne, de l'histoire de la pratique et des valeurs qui lui sont associées), et de savoir-faire (maîtrise des techniques d'ascension et d’assurage, utilisation du matériel : corde, piolet, et crampons) ainsi que par l'acquisition indispensable de connaissances variées sur le milieu d’exercice, naturel et non aménagé (verticalité, altitude, glaciers), sur les conditions climatiques changeantes et sur l'appréciation d'événements physiques aléatoires (avalanches, tempêtes…). La culture de l’alpinisme s’appuie aussi sur des références esthétiques, les alpinistes étant attachés à la beauté des itinéraires, à l’élégance du geste dans l’ascension, à la contemplation des paysages et à la communion avec les milieux naturels traversés. La pratique mobilise en outre des principes éthiques reposant sur un engagement de chacun, une économie de moyens, une absence de traces rémanentes laissées derrière soi, une prise de risque mesurée et un devoir d’entraide et de secours entre les alpinistes. Le style et l'expérience sensible priment souvent sur la réussite de l’ascension d’un sommet.

L’alpinisme repose également sur des formes de sociabilité partagée, essentielles dans les motivations des pratiquants et la conduite de la course (terme désignant une ascension). L’ambiance des refuges permet aux alpinistes d'échanger connaissances et expériences, via notamment les récits de course, partagés le soir par les équipes. « L'esprit de cordée » est un autre élément fondamental de l’imaginaire des alpinistes. La cordée désigne l’ensemble des alpinistes reliés à une corde pour l’ascension. Ce lien physique n’est que la matérialisation d’un esprit de solidarité sans faille qui requiert des partenaires de l'ascension une forte compréhension mutuelle et un partage constant des responsabilités, dans les difficultés comme dans les réussites. Cet état d’esprit permet d’adopter collectivement des attitudes qui permettront de gravir le sommet.

Pourquoi inscrire l'alpinisme à l'UNESCO ?

Claude Marin, Guide de Haute Montagne et ancien  responsable de la Culture à la Mairie de Chamonix, a été le Coordonateur de ce projet. Il a travaillé pendant 10 ans avec les Guides de Haute Montagne : Bernard Prudhomme et Claude Gardien pour inscrire l’Alpinisme sur la liste du Patrimoine Culturel et Immatériel de l’Humanité de l'UNESCO.

Mars 2018, une candidature est déposée suite à la sollicitation des maires de Chamonix Eric Fournier et de Courmayeur Stephano Miserrochi. La commune d'Orsières rejoint un peu plus tard la candidature.

Pour prétendre à une inscription sur la liste du Patrimoine Culturel Immatériel, l'alpinisme devait en effet faire preuve d’« une histoire, vivante à travers ses traditions », d' un ancrage local », d' « une représentation internationale », « de valeurs universellement partagées » et de « l'existence d'une transmission, et de structures l'assurant (clubs, écoles spécialisées, revues, sites web) ».

11 décembre 2019, le 14e comité intergouvernemental en session à Bogota (Colombie) a proclamé l'inscription sur la liste représentative du Patrimoine Culturel Immatériel de l'Humanité. L'inscription à l'UNESCO est ainsi une « reconnaissance universelle de savoir-faire, de savoir-être et de valeurs spécifiques ancrées dans la pratique depuis des siècles », grâce à un texte qui engage les États et les structures associées à défendre l'activité et sa pratique. Depuis 2003, L'ONU célèbre le 11 décembre "La Journée Internationale de la Montagne"

La candidature portée par 3 communes reconnues au plan international comme des hauts lieux de l’Alpinisme, satisfait aux critères d’inscription sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité comme suit :

  • L’alpinisme joue un rôle central dans l’interaction sociale entre les praticiens et contribue à cultiver le respect mutuel entre compagnons de cordée, qui sont plus que de simples partenaires d’ascension. Les alpinistes considèrent leur pratique comme une expérience très intense où se nouent des relations durables, au-delà des barrières sociales, générationnelles et nationales. L’Alpinisme est perçu comme un exemple majeur de patrimoine culturel immatériel lié à la connaissance de la nature.
  • L’inscription de l’alpinisme au Patrimoine Culturel et Immatériel de l'Humanité mettrait en lumière la relation étroite entre le patrimoine culturel immatériel, l’environnement et le développement durable. Elle renforcerait également le sentiment de responsabilité commune pour l’entretien et la restauration de lieux à valeur sociale importante – les refuges de haute montagne – et sensibiliserait davantage les États parties soumissionnaires à l’existence d’une histoire et de valeurs communes. L’inscription pourrait également raviver et approfondir le dialogue existant entre les communautés d’alpinistes, en entraînant la création de nouvelles plateformes de partage d’informations. La pratique repose sur une collaboration ingénieuse visant à trouver des solutions créatives à des situations difficiles.
  • Les mesures de sauvegarde proposées incluent des actions de sensibilisation ciblant de nouveaux publics ; la protection des alpinistes face aux risques de mise en danger de leur activité ; la prévention des risques liés à la banalisation des pratiques et de leurs lieux d’exercice ; et le renforcement de la veille préventive face aux atteintes à l’environnement. Les communautés, où la mixité est la règle, ont toujours été impliquées dans la planification des mesures de sauvegarde proposées, notamment par le biais des clubs alpins, organismes largement représentatifs des communautés.
  • La candidature a été préparée par diverses communautés d’alpinistes – membres des clubs alpins, guides de haute montagne – des chercheurs et des maires des communes concernées, qui ont formé un comité de pilotage. L’élaboration du dossier a été à l’ordre du jour de nombreuses réunions de ce comité, et son contenu a également fait l’objet de débats au sein de la communauté des alpinistes au sens large. Au cours de ces réunions rassemblant des hommes et des femmes, les participants ont complété le dossier et élaboré les mesures de sauvegarde.  
  • L’Alpinisme est inclus dans le patrimoine culturel des trois États parties. Il est inscrit à l’Inventaire national du patrimoine culturel immatériel de la France depuis 2015, à l’Inventaire national du patrimoine culturel immatériel de l’Italie / Convention de l’UNESCO de 2003 depuis 2018 et sur la liste des traditions vivantes en Suisse depuis 2017. La gestion de ces inventaires est principalement assurée par les communautés, qui effectuent des mises à jour si nécessaire.


  
Ce classement par l’UNESCO porté par trois communes « Hauts Lieux de l’Alpinisme » : Chamonix, Courmayeur et Orsières, avec le soutien des Syndicats des Professionnels de la Montagne, des Fédérations et Clubs de Montagne constitue une opportunité pour les territoires et communes de montagne. Dans ces communes de Haute Montagne, l’Alpinisme est une pratique physique ancestrale ayant ses valeurs, qui se caractérise par une culture partagée, un art fait de savoirs, de savoir-faire et l'acquisition indispensable de connaissances variées sur le milieu d'exercice et son environnement.

L'inscription de l’Alpinisme au PCI de l'UNESCO est un outil de communication, de développement et de sauvegarde :

  • Le développement touristique.
  • Contre la judiciarisation croissante de l'activité.

Cette présence au PCI permettra :

  •  La promotion et le développement de l'alpinisme auprès du plus grand nombre.
  •  Le développement touristique des villes et territoires s’engageant à porter les valeurs de l’Alpinisme.
  •  Le développement de la pratique, donc le besoin de professionnels (guide de haute Montagne) pour initier et former.